En septembre, elle a remporté le MAD graduation prize et, le 30 novembre de cette année, le Belgian Fashion Award dans la catégorie "diplômée de l'année". Leslie Nonvignon est sans aucun doute un talent émergent ambitieux à surveiller. Avec sa collection de fin d'études intitulée "Rite of Passage", elle jette le pont entre sa quête d'identité en tant qu'esprit créatif et la représentation de l'Afrique passée et présente pour créer une collection composée de silhouettes "totem". Leslie offre à notre regard une collection codifiée où les symboles de sa culture africaine prennent vie sur une toile de fond mystique. MAD Brussels s'est entretenu avec Leslie au sujet des prix qui saluent son travail, de son avenir et de sa vision du monde de la mode d'aujourd'hui.
Pouvez-vous vous présenter ? Qui est Leslie Nonvignon et que faites-vous actuellement ?
"Je m'appelle Leslie Nonvignon, j'ai 28 ans. Je suis née à Paris dans le 9ème arrondissement. J'ai étudié les langues lors de mon Bachelor en langues étrangères en anglais et en japonais avant de commencer mes études en design de mode. J'ai quitté Paris pour Bruxelles et j'ai commencé mes études à la Haute École Francisco Ferrer. Cela fait donc 4 ans que j'étudie la mode à Bruxelles."
"Cet été, j'ai à nouveau déménagé à Paris. J'avais quelques petits projets de couture ici et là. Mais le plus important pour moi était de pouvoir me reposer un peu après mes études. Je n'ai donc pas immédiatement commencé à chercher un emploi. Je voulais prendre un peu de temps pour moi, et aussi pour pouvoir concevoir quelques pièces. Car pendant mes 4 années d'université, je n'ai pas vraiment eu le temps de me consacrer à mes propres projets en plus de ceux de l'école. Cet été, je me suis donc remise à la couture. Actuellement, je suis à la recherche d'un emploi. De préférence un emploi d'assistante styliste ou d'assistante chef de produit. C'est ce que j'ai fait pendant mes stages."
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre collection de fin d'études "Rite of Passage"?
"Pendant ma dernière année d'études, j'ai créé la collection que j'ai présentée pour ma nomination aux Belgian Fashion Awards. Cela faisait un moment que j'avais envie de créer cette collection. Je voulais vraiment travailler autour du thème de l'identité, de la diaspora, du fait d'être originaire d'un pays africain. Mais aussi le fait de grandir entre deux cultures et l'importance de réfléchir à notre identité et à nos origines. Car un.e designer.euse est toujours inspiré.e par son environnement ou ses origines. Alors comment cette double culture influence-t-elle le processus de création ? Comment s'inspirer de certains éléments de notre culture ou de la façon dont nous avons été élevés ? Et comment traduire cela dans une collection ? Ma collection est une première étape dans ce processus pour moi. J'ai pu y intégrer mes propres inspirations et idées. Et bien sûr, ma culture africaine, plus précisément mes racines béninoises et nigérianes, d'où mes parents sont originaires."
"La dernière année de mes études m'a permis de travailler en profondeur sur ce sujet. J'avais aussi mon objectif, pas seulement de créer une seule collection autour de ce thème, mais plusieurs collections. Actuellement, je travaille donc toujours sur de petits projets autour de ma collection, comme la broderie et certaines techniques d'Afrique. Pour cela, j'ai fait appel à Dominique. Elle m'a également aidée pour ma collection de fin d'études. Grâce à des techniques telles que le tissage, nous essayons de créer des textures et des motifs intéressants. J'essaie de profiter du fait que je peux me consacrer à cette activité pour le moment, étant donné que je n'ai pas encore d'emploi. Car je suis consciente que lorsque je serai dans la vie active, il me sera beaucoup plus difficile de travailler sur mes propres collections."
Comment envisagez-vous l'avenir ?
"Je veux vraiment travailler dans l'industrie de la mode, et créer. J'ai déjà reçu des propositions pour travailler dans des secteurs connexes, comme le merchandising, ou être assistante pour des marques de luxe et être chargée d'habiller des personnes célèbres. Mais cela ne m'intéresse pas. Je veux travailler avec mes mains. J'ai déjà fait un stage dans une marque de vêtements de luxe pour hommes pendant mes études. J'y étais assistante chef de produit et je devais collaborer avec des fournisseurs à l'étranger. Je recevais et examinais des prototypes et je faisais des recherches sur les matériaux utilisés. Ce qui m'intéresse le plus, c'est de devenir styliste ou assistante styliste. J'ai envie de travailler sur des collections du début à la fin. Pouvoir suivre le processus de création, des croquis aux dessins techniques et contrôler la qualité des pièces que nous recevons. C'est passionant et c'est pleinement en adéquation avec mes études. Dans le cadre de mon stage, j'ai vraiment pu m'immiscer dans cette expérience. Qu'il s'agisse d'une petite entreprise, d'une marque ou d'une grande marque, cela n'a pas d'importance pour moi. Ce qui compte, c'est d'acquérir de l'expérience et d'apprendre sur le terrain."
Vous rêvez de lancer votre propre marque ?
"Je pense que c'est le rêve de tout.e jeune créateur.rice de continuer à construire sa propre marque, de pouvoir développer sa propre idée de la mode. Pour ma part, je préfèrerais le faire avec No Bounds, la marque avec laquelle j'ai développé ma collection de fin d'année. Je n'ai pas envie de créer ma propre marque, du moins pas à ce stade. J'ai le sentiment que j'ai besoin d'un peu plus d'expérience et de connaissances pour cela. Je veux acquérir davantage de connaissances sur différents aspects tels que la communication, les outils numériques et les réseaux sociaux, afin de construire une marque viable à long terme. Je veux me plonger un peu plus dans le secteur avant de commencer à développer ma propre marque de manière professionnelle. J'espère pouvoir mener à bien certains de mes propres projets tout un exerçant un autre emploi à côté."
Qu'est-ce que cela signifie pour vous de remporter un Belgian Fashion Award ?
Je ne m'attendais pas du tout à ce prix décerné lors des Belgian Fashion Awards. Tout comme celui du MAD Graduation Prize. Venant d'une école belge, du moins d'une école bruxelloise, être nominée dans une telle catégorie est un réel honneur. Recevoir le MAD Graduation Prize et de la sorte que mon travail soit reconnu par MAD Brussels signifie beaucoup pour moi. Je pense que cela m'a également donné la visibilité nécessaire pour ma nomination aux Belgian Fashion Awards. Je suis donc très reconnaissante à l'équipe du MAD de m'avoir donné l'opportunité de développer mon expérience en tant que jeune designer. Et ce trophée des Belgian Fashion Awards a été la cerise sur le gâteau. Les Belgian Fashion Awards, c'est un évènement incroyable, qui rassemble tant de personnes créatives qui débutent ou qui au contraire sont dans l'industrie depuis un certain temps. J'ai été très honorée d'être nominée aux côtés de tous ces jeunes créateurs.rices qui viennent de terminer leurs études. Nous avons tous et toutes fourni un excellent travail et créé des collections uniques et personnelles. Cette catégorie représente également la gloire et la qualité des écoles belges."
"Pour moi, c'était aussi une validation de mon travail. Le message est passé, mon travail plaît aux gens et ce n'est pas pour rien. Le fait d'être reconnu par des gens du terrain qui ont de l'expérience et qui ont un regard extérieur, c'est très motivant. Cela me donne de l'énergie pour sortir de ma zone, pour prendre des risques. C'est le moteur pour aller plus loin et lancer ma marque."
Avez-vous des conseils à fournir aux jeunes étudiant.e.s en mode ?
"L'un des conseils que je donnerais aux jeunes étudiants ou à moi-même si je le pouvais, c'est de ne pas abandonner. En tant que jeune designer sans expérience, vous allez rencontrer beaucoup d'obstacles. Vous aurez des difficultés à avancer, tant dans votre façon de créer qu'avec les personnes à qui vous présenterez votre collection. Il est important de ne pas perdre confiance, de croire au message que l'on souhaite faire passer à travers sa collection. Vous devez mettre ce message en avant, comme votre objectif."
"En plus de cela, il est primordial de bien s'entourer. La famille, les amis et les mentors sont précieux. Et de savoir qu'il y a toujours des possibilités et des solutions, y compris pour les questions financières. Lorsqu'il s'agit de votre rêve, de votre passion, vous ne pouvez pas les laisser tomber. Parfois, on se retient, on se dit "ce n'est pas pour moi". Mais ce n'est qu'un but, celui de briser les barrières. Je pense que c'est un message très important."